AAARG: crac, boum, hu!!
Vous faites de l’édition aussi.
Des auteurs BD avec une meilleure formation initiale d’ailleurs.
Vous faites de l’édition aussi.
Des auteurs BD avec une meilleure formation initiale d’ailleurs.
Rencontre avec Sylvain Ricard, journaliste et scénariste BD, mais surtout membre fondateur de la « Revue Dessinée » ; journal BD, né en 2013, qui traîte de l’information brûlante dans le monde et de sujets fort contemporains. Revue avec des choix éditoriaux pointus dans leur analyse du monde actuel, qui fait aussi intervenir journalistes et dessinateurs de talent, que ce soit Etienne Davodeau, Carlos Nine ou Emmanuel Lepage…des dessinateurs au graphisme fort et à l’univers original. Enième revue BD? Pas du tout, d’abord une revue qui traîte de sujets contemporains par le biais du médium BD.
Un assemblage donc de journalistes, scénaristes, dessinateurs et éditeurs pour une revue trimestrielle de qualité et en constant renouvellement. Entretien réalisé en septembre 2014.
Pouvez-vous nous parler du concept de « la Revue Dessinée »?
http://www.larevuedessinee.fr/
Le concept de « La Revue Dessinée » est de proposer une grosse revue trimestrielle (près de 230 pages) qui traite d’actualités en bande-dessinée, avec pour ligne éditoriale de proposer un éclairage sur le monde contemporain et mieux faire comprendre la société dans laquelle nous vivons.
J’ai lu quelque part que votre revue est née de frustration d’auteurs, de journalistes, de dessinateurs pas contents de leur sort et surtout du monde de l’édition.
C’est un peu ça, oui. Faire un livre, ce sont des mois de travail (s’il est publié), et seulement quelques semaines dans les rayonnages de librairie. C’est effectivement un peu frustrant. La frustration est venue aussi de ne pas pouvoir faire de la BD comme on le voulait en faire ou très difficilement. Enfin, frustration de ne pas pouvoir lire la revue que l’on voulait lire. Nous avons donc agi en conséquence…
Vous êtes passé par le crowfunding pour le lancement de la revue?
Pas exactement. Nous avons créé une société qui édite le titre. Nous sommes passés par le site « Ulule » pour une campagne de pré-abonnement.
Vous êtes content des premiers tirages?
On a imprimé le numéro 1 à 15000 exemplaires et au bout de 15 jours, on en a réimprimé 6000 puis 3000 exemplaires. Les autres numéros sont imprimés à 20000 exemplaires. Nous sommes distribués dans le réseau des libraires et sur abonnements.
Le lancement du journal s’est bien réalisé et l’accueil fut bon d’ailleurs.
Oui c’est vrai, on était assez content du lancement.
Vous fonctionnez avec les mêmes dessinateurs?
On a travaillé jusqu’à présent avec près de 50 dessinateurs. Nous collaborons essentiellement avec des auteurs concernés par le monde qui les entoure. On veut aussi des dessinateurs qui nous apportent leurs points de vue sur les sujets traités. Seules les chroniques thématiques voient les mêmes auteurs revenir.
Je vois que vous avez travaillé avec Etienne Davodeau. D’autres aussi?
Pour les plus renommés des dessinateurs, il y a Emmanuel Lepage, Carlos Nine, Nicoby, Daniel Casanave, Benjamin Adam, Thibault Soulcié, James et tant d’autres. Pour nos diverses couvertures on a eu Gipi, Mattoti, De Crécy entre autres. Ce qui nous intéresse ce sont des auteurs BD qui ont une vraie intelligence, un sens critique et qui, bien entendu, savent dessiner. C’est vrai que l’on peut considérer que nos dessinateurs ont un univers parfois « arty » et moderne, mais cela nous convient très bien. Certains auteurs publient pour la première fois, même chose pour les journalistes.
Vous êtes trimestriel ; à terme, vous voulez être mensuel?
Non, nous resterons sur un rythme trimestriel.
Vos reportages BD sont beaucoup liés à l’état du monde, aux guerres, aux problèmes environnementaux.
On est très fiers de nos numéros ; on a travaillé sur les nationalismes en Europe. On commence à travailler sur la ville, l’urbanisme. On travaille aussi sur beaucoup de domaines politiques, économiques et artistiques. On essaie de faire une revue variée. Nous souhaitons être présents dans l’espace médiatique, sociologique, journalistique et non dans l’espace BD. Je tenais à préciser que ce n’est pas une revue BD mais qui se sert du format BD pour traiter de l’actualité, ce qui est différent.
Vous avez donc un an d’existence…
Oui, un an de publication. Tout juste avec ce numéro 5 qui sort le 12 septembre.
Vous êtes diffusés partout en France?
Oui, dans le réseau spécialisé et dans le réseau généraliste, les relais H, les grandes enseignes etc. Nous sommes également présents en Belgique, Suisse et Canada.
Vous allez faire de l’édition?
Plutôt de la co-édition, avec « Futuropolis » probablement.
Vous êtes passés par le fanzinat?
Non du tout, qu’il s’agisse de moi ou des autres auteurs de la revue.
Peut-on vous comparer à « l’Association »?
Non, je ne crois pas. C’est une petite structure avec des actionnaires, des journalistes et auteurs fondateurs, des budgets, une trésorerie, c’est une société par actions simplifiées et non pas une association. De plus, nous éditons une revue, on ne fait pas de livres. La même année de notre naissance, on a vu se créer, outre « La Revue Dessinée », les revues « Professeur Cyclope », « Mauvais Esprit » (malheureusement finie) et « Aaarg! » mais nous n’étions pas des revues sur les mêmes créneaux. Nous, nous sommes la première revue entièrement destinée à l’information en BD.
Je me souviens bien, vous aviez eu un très bon retour des médias pour votre lancement.
Oui mais le problème, ce n’est pas le lancement mais de durer. C’est maintenant que c’est difficile. Pour les tirages, on en est à peu près au même niveau, mais nous espérons évidemment progresser sur la seconde saison.
La revue « Aaarg! » se définit comme une revue BD alternative, est-ce votre cas?
Non, non on n’est pas alternatif, mais on est complètement indépendant. On ne dépend pas de subventions, ni de publicités. La revue tient des ventes en librairie et par abonnements. On a eu des aides essentiellement pour la partie I-PAD, mais rien d’autre.
Que pensez-vous de la surproduction BD actuelle?
http://www.acbd.fr/category/les-bilans-de-l-acbd/
Sans doute que l’on y participe indirectement. Je ne sais pas trop. Ce qui est sur, c’est que la surproduction, j’en ai été moi-même victime. Ce fut toujours difficile de trouver un éditeur et les avances sur droit sont beaucoup moins importantes. Il existe actuellement une véritable paupérisation des auteurs BD.
Vous connaissez les combats du SNAC-BD?
Oui bien sûr, j’ai été vice-président du SNAC pendant quelques temps. J’ai été dans le comité de pilotage, je connais donc bien ce syndicat. Je suis solidaire avec les combats de ce syndicat, trop d’auteurs ne sont pas adhérents, pourtant ce syndicat est bien utile pour les auteurs et il publie chaque année un rapport d’activités qui montre à quel point ce groupement est très utile.
Et pour « la revue dessinée », vous avez réalisé une étude de marché?
Non, on s’était dit, les revues marchent, une revue sur l’information en BD va donc sûrement marcher. Voilà notre étude de marché (rires). Mais c’est vrai que l’on a besoin actuellement de plus d’abonnements pour la revue. C’est une revue qui coûte très chèr à fabriquer, on paie tous ceux qui participent à cette revue. On a quand même des seuils de rentabilité et des coûts de production assez hauts.
Envisagez-vous un peu de publicité dans la revue?
Non, on ne veut pas en mettre pour l’instant. Pour en revenir à la revue numéro 5, revue qui est donc sortie le 12 septembre 2014, il y a le sujet de Etienne Davodeau et de Benoit Colombat sur la mort du Juge Renaud, il y a un grand sujet sur les emprunts toxiques de la banque Dexia (de Catherine Legall et Benjamin Adam), un autre sujet de Carlos Nine sur Pierre Etaix, et un sujet sur le nationalisme écossais (de gauche) avec le prochain référendum du 18 septembre en Ecosse.
Ce sont les journalistes qui vous proposent ces sujets?
Oui le plus souvent, et on les met en relation avec des dessinateurs. On veut avant tout éviter les sujets tout faits du journal télévisé, permettre aux journalistes de bien raconter les choses avec de belles perspectives, avec intelligence. Nous misons sur la qualité des articles et l’intelligence de nos auteurs et des lecteurs.
https://www.youtube.com/watch?v=nYxpvaFuYJg
Propos recueillis par Dominique Vergnes
Images © La Revue Dessinée