Virginie Efira 2.0
Bon chers amis lecteurs, si vous n’avez pas encore compris que je demeure un grand fan de cette actrice en devenir et de sa démarche artistique, ça veut dire que vous ne suivez pas régulièrement RUBRIQUES NANTAISES, petits coquinous! Et ça c’est TRES grave.
https://culture494.wordpress.com/2017/07/16/virginie-efira-politique-dune-actrice/
Et pour rappeler une évidence, si en ce moment, Virginie Efira a « la carte »(Expression de Jean Rochefort et de Jean-Pierre Marielle pour expliquer comment certains acteurs et actrices sont à la mode et profitent ainsi de l’indulgence des critiques) vis-à-vis de médias culturels branchés comme « les Inrocks » ou « Libération ». Il faut se poser la question pourquoi cet engouement depuis peu (alors qu’il faut bien dire que certaines de ses anciennes comédies étaient disons un peu moins médiatisées). Déjà, par les prouesses d’actrice de Virginie Efira dans « Victoria »(2016) ou « 20 ans d’écart »(2013), et par ses rôles où s’incarnent des femmes actives engluées dans des vies privées compliquées.
http://www.lesinrocks.com/cinema/films-a-l-affiche/victoria/
http://next.liberation.fr/cinema/2016/05/11/virginie-efira-second-life_1451963
Shooting pour le « ELLE » Belgique en 2009:
Vie privée compliquée où tout se mélange, le rapport avec les enfants, avec soi, avec les hommes, avec son ex ; c’est pour cela, entre autre, que « les Inrocks » ont adoré « Victoria », car en tant que média culturel, ils considèrent que dans nos vies modernes, tout est lié, l’intime, le politique, la musique, les images, les films, notre rapport aux autres et au monde, et c’est bien le propos général de « Victoria », mêler l’intime et le professionnel comme pour le film précédent de Justine Triet, « la bataille de Solferino »(2013), mais dans un cadre politique plus marqué, le second tour de l’élection présidentielle française en mai 2012. Et comme le rappelait « les Cahiers du Cinéma » de septembre 2012 dans leur dossier « où sont les femmes? », Ne tombons pas cependant dans le cliché film de femme=film plus sensible ou intime, les films de Justine Triet sont bien plus complexes et bordéliques que cela. Il faut voir dans ce film la mère (Laetitia Dosch) et l’ex (Vincent Macaigne) se foutre carrément sur la gueule pour la garde et l’obtention des enfants. Ce n’est pas un film aimable, loin de là.
https://www.youtube.com/watch?v=oce2z-ca-z0
https://www.youtube.com/watch?v=lQGhl1MlLgA
Par ce film « Victoria », tout se rassemble ainsi pour former une société, avec ses manques ou ses névroses et en cela composer une modernité bien affirmée. C’est la grande thèse du film de Jean-Luc Godard dans « One plus One »(1968), documentaire expérimental qui suit la répétition des Rolling Stones avec leur chanson mythique »Sympathy for the devil » de leur album « Beggar banquets »(1968) et met en parallèle des images révolutionnaires ou politiques de l’époque (discours des Black Panthers par exemple). Ce parallélisme cherche à démontrer que tout est bien lié dans nos vies contemporaines, la création au sens pur mais aussi le politique ou les conflits dans le monde qui s’agrègent à cette créativité, mais qui peuvent aussi la détruire (Deux phases dans ce documentaire, création et destruction). La modernité des Rolling Stones est ainsi le reflet d’une époque en pleine mutation (les sixties dans le monde).
https://www.youtube.com/watch?v=D8K6SUFt9Vs&t=19s
BRIAN JONES et JEAN-LUC GODARD:
https://www.youtube.com/watch?v=uqQigv0NQeU
Virginie Efira incarne donc cette modernité féminine où tout est mélangée, l’intime, un rapport au corps compliqué et des situations de vie souvent comiques, voire moments dépressifs ou de vulnérabilité (il faudrait analyser « Victoria » aussi suivant l’horizontalité et la verticalité des corps ; ainsi, lorsque Victoria est au plus mal, elle tombe littéralement, chez elle, au tribunal ou se trouve en position couchée chez le psy). D’ailleurs, pour moi, on pourrait presque considérer ce film comme une vaste psychanalyse de Virginie Efira (allons-y dans le délire!!), son passage symbolique vers le cinéma d’auteur, avec des figures tutélaires dans le film qui l’accompagneraient étape par étape (la géniale Sophie Fillières, Vincent Dietschy, Vincent Lacoste, Melvil Poupaud…), pas mal hein, Roland Barthes nous voilà! Ca c’est de l’analyse sémiologique, hahaha!! Bac plus 4 pour en arriver là (et ouais!).
De manière générale, ce qui est remarquable dans ce film, c’est comment il arrive à intégrer dans sa mise en scène et son propos même, le schéma originel lacanien à savoir l’inconscient par rapport au conscient ; le personnage de Victoria Spick vit des choses difficiles dans sa vie personnelle et professionnelle, elle n’arrive plus à amortir ces faits réels par son imaginaire ou son inconscient. Il y a donc danger pour elle ; elle ne sait plus rebondir devant l’obstacle d’où malaise, voire dépression.
Le schéma lacanien:
Et quand on parle de « carte » et de modernité, posons-nous la question en quoi et comment?
« La chance de ma vie »(2011):
Déjà, elle incarne la femme moderne dans ses divers rôles ou statuts, avocate, designer ou rédactrice mode ; femme divorcée MAIS qui a de bons rapports le plus souvent avec ses ex…modernité aussi dans les moyens de communication par SMS, portables, clé USB, tablette ou iPad.
Exemple d’Alice Lantins dans « 20 ans d’écart »(2013), rédactrice de mode rigoureuse et trop sérieuse (dans un monde fashion disons frivole, son trop grand sérieux est ainsi source de quiproquos et donc situations de comédie ) ; elle est souvent en décalage, déjà dans son métier, vis-à-vis de son boss ou par rapport à sa soeur (l’impayable Camille Japy), à ses collègues, utilise son portable ou son iPad à bon escient afin de prouver sa réelle modernité et sa « branchitude »(scène dans le film où elle s’envoie de faux messages SMS).
Elle sort ainsi dans des endroits parisiens à la mode avec son compagnon de 19 ans: soirée vernissage bien codifiée, défilé de mode, exposition art contemporain et boîte de nuit au programme. « 20 ans d’écart », c’est aussi un film qui met en avant bon nombre de lieux et endroits parisiens avec leurs codes et leurs normes.
https://www.youtube.com/watch?v=Sqrou_v8FFc
Pierre Niney et Virginie Efira:
Virginie Efira et David Moreau (le réalisateur de « 20 ans d’écart ») et toujours les écrans:
LA MILF:
De plus, dans « Victoria »(2016), le personnage est souvent en mouvement. C’est bien simple, elle court tout le temps, que ce soit pour aller au tribunal, pour voir sa voyante, prendre le train, pour se rendre dans un tribunal de province, pour aller d’un procès à l’autre ; flux des mouvements qui participent à l’instabilité personnelle du personnage (comme elle le dit elle-même à la fin du film, je n’ai pas deux secondes de paix intérieure…) ; modernité aussi dans les moyens de communication par les SMS envoyés, le mari blogueur fou, le club Internet dans le café, le portable incassable, les iPad de ses filles dans le film (avec cette phrase si emblématique par une de ses filles: « Lâche-moi, c’est mon corps!! » Lorsque Vincent Lacoste tente de lui reprendre son iPad personnel).
De plus, le personnage joué par Vincent Lacoste, afin de s’affirmer et d’exister auprès de Victoria à la fin du film décide de détruire son outil de travail (PC et écran) et de quitter l’appartement.
Cette scène a d’ailleurs un côté vaudeville assumé, on y retrouve ainsi dans la même pièce tour à tour le jeune amant (Vincent Lacoste), l’ami défendu pénalement (Melvil Poupaud), l’ex envahissant (Laurent Poitrenaud) et le garde du corps protecteur pour une ronde des sentiments où Victoria Spick joue un rôle central et doit s’y débattre pour ne pas perdre pied.
Personnage féminin qui se pose des questions sur sa sexualité (virile?) et de femme phallique assumée avec ces hommes rencontrés sur Internet (avec l’inénarrable INTELLO BG75). Ainsi, le propos de Justine Triet s’en trouve renforcée, mettre en image le portrait d’une femme, d’une avocate par les diverses personnes de son entourage qui la révèlent à elle-même.
De plus, elle-même, au sortir de sa dépression et de sa mise à pied, le reconnaît, il faut qu’elle se reconnecte à l’humanité. Et ce qui est savoureux dans ce film, c’est comment le personnage de Victoria Spick (déjà le nom!), tout en étant connecté réseau, a besoin de médecine chinoise (acupuncture), d’un psychanalyste (lacanien ou freudien?) ou d’une voyante pour se sentir beaucoup mieux ou prévoir l’avenir. Obsolescence de la technologie sur le plan humain?
En tous les cas, elle représente aussi une femme avocate et de lois et paradoxalement, elle a besoin de ces choses irrationnelles comme la voyance ou la psychanalyse pour avancer dans sa vie. Ordre juridique contre désordre intime, qui sera le vainqueur? Désordre intime renforcé par l’utilisation de stupéfiant (scène hallucinante de la plaidoirie finale réalisée par Victoria Spick sous acide…). Tout le film se divise ainsi en plusieurs phases ; phases rationnelles contre irrationnelles et se complètent assez bien.
Et d’un point de vue esthétique, c’est aussi intéressant à mettre en image, comment montrer des personnes en analyse, des gens en souffrance, résoudre des problèmes psychiques et familiaux ; bref, des choses difficilement filmables.
De plus, toujours sur le plan esthétique, notons l’importance criante des couleurs primaires dans ce film comme le rouge (rouge comme les robes des juges, les murs du Tribunal, la jupe et le chemisier de Victoria, son rouge à lèvres, le rouge des codes civils…). Couleur rouge à mettre en parallèle avec le noir bien présent aussi dans ce film ; robe noire des avocats et des juges, veste noire de Victoria, tâches noires du dalmatien, chemisier tâcheté de noir d’Eve Score…Alors « Victoria », « le rouge et le noir » version 2016?
Ce film reste ainsi passionnant car c’est un long métrage polysémique, que l’on peut analyser sous divers aspects mais les 3 premières scènes du film sont primordiales (une première introduction chez le psy puis générique du film avec les 2 filles dans leur cocon devant la télévision et enfin l’arrivée de Victoria Spick dans son appartement (et la dispute avec le baby-sitter)). Premières scènes du film « Victoria » qui font la liaison directe avec la fin de « la bataille de Solférino » (2013), où Arthur, le juriste, se posait des questions sur sa légitimité professionnelle (scène du restaurant japonais) et est à mettre en parallèle avec l’arrivée de Victoria Spick dans son appartement-cocon. La maïeutique du film est ainsi en marche (comme MACRON!).
Pour finir, en tant qu’actrice ou personne médiatisée, elle a bien compris (disons tardivement) l’utilisation à des fins personnelles des réseaux sociaux ou blogs à sa propre renommée (https://www.pinterest.fr/pin/656540451909035665/). Attendons donc avec grande impatience un de ses prochains film « Benedetta » avec Verhoeven à la réalisation.