Annie Goetzinger (1951-2017): la BD adulte au féminin.
La BD dite adulte n’en finit pas de perdre ses principaux artisans pour 2017 (Jidéhem, Jean-Luc Vernal, Gotlib…) ; en voilà encore un bon exemple avec Annie Goetzinger et son dessin si caractéristique, malheureusement décédée en décembre 2017. Comme pour Jean-Marc Rochette avec Jacques Lob (pour les aventures du Transperceneige…), ce fut une dessinatrice qui avait besoin de bons scénaristes (Pierre Christin, Victor Mora…) pour s’affirmer et développer un graphisme si spécifique pour des histoires au relent d’Arsène Lupin et des mystères début XXème siècle.
Dessin marqué par l’Art Nouveau du début du XXème siècle avec des aventures trépidantes comme « Félina » de Victor Mora au scénario ; dessinatrice totale, elle réalisera aussi des costumes de scène, de théâtre, des illustrations, des histoires courtes et dessins de presse pour « le Monde » et « La Croix ». Dessinatrice qui aura marqué les années 1970-1980 comme Claire Brétécher ou Chantal Montellier (une des seules femmes BD récompensées à Angoulême d’ailleurs).
BD réaliste avec des relents érotiques (qui ont bien marqué mon enfance marquée sous le sceau du jansénisme et d’une morale à toute épreuve (mais si! Hé ho, on est né en Vendée quand même)). Histoire BD avec souvent des passages d’initiation féminine et qui décrivaient le plus souvent l’aliénation féminine de la Belle Epoque. Des femmes marquées d’abord par le pouvoir masculin, une sexualité subie ou souvent réprimée (exemple caractéristique de « la demoiselle de la Légion d’Honneur », éd.DARGAUD, Paris, 1981).
Sa série BD la plus connue est « Félina »(éd. GLENAT, 1982-1986), histoire d’une orpheline du début du XXème siècle devenue saltimbanque (elle a épousé un richissime homme d’affaires Wilbur Kholderup, malheureusement assassiné par la secte Kriss), et qui devient « Félina » la nuit, habillée de satin noir, super-héroïne qui parcourt l’Europe durant la Belle Epoque pour à la fois venger son mari (avec l’aide de 2 bons amis, un sage tibétain, Lobjak, et Septimus Pembroke, un colonel de l’armée britannique) et pour mettre fin aussi aux agissements de bandits, de pirates, d’escrocs en tout genre, de financiers véreux…Histoire d’abord publiée en 1979 dans le magazine « CIRCUS », puis « PILOTE » en 1982.
De manière générale, ses histoires BD sont très déterminées par un certain formalisme, des touches graphiques bien reconnaissables (référence à l’Art Nouveau et à MUCHA pour « Félina », camaïeux de couleurs, lignes sensuelles des vêtements…), style sensuel et légèrement érotique où le corps de la femme est magnifiée pour des aventures épiques et d’espionnage (un peu comme Tardi et la mythologie parisienne du début XX siècle avec Adèle Blanc-Sec…).
Tableaux d’Alfons Mucha (1860-1939):