Le dernier numéro de « SO FILM » met en avant par sa couverture et un entretien d’avec Vincent Lindon, dont les choix comme acteurs révèlent un vrai tempérament, un veritable artiste avec des choix radicaux assumés.
Personnage intéressant et qui aime lui aussi les artistes ingérables, les vraies personnalités à fort tempérament. Comme le dit « So film », un acteur qui vitupère, chuchote, s’exclame, passe d’un sujet à un autre lors de l ‘entretien…bref, un comédien qui vit et survit.
Un entretien plein d’allant, de vie et d’âme comme le personnage…entretien découpé en plusieurs chapîtres avec tout d’abord, une référence forcée au COVID19 et la joie de revoir un vrai public au cinéma.
Et avec la sortie de « mon cousin »(2020), Vincent Lindon et François Damiens sont très heureux de rencontrer un vrai public. Et par ce film, il montre comment il a construit peu à peu son personnage de milliardaire, ses vêtements jusqu’aux boutons de manchette, ses pantalons…lui-même se définit comme un véritable artisan qui « fabrique » son personnage, son métier, ses us et coutumes d’artisan comme dans « Mademoiselle Chambon »(2009) et le métier de maçon (comment jeter du ciment et comment l ‘essuyer notamment).
Même chose pour la sculpture avec « Rodin »(2017) . Vincent Lindon qui adore foncièrement les tournages, le côté colonie de vacances de ces tournages et c ‘est un bon petit soldat comme acteur, toujours au service du metteur en scène et du film.
Et il adore être filmé par des femmes, Claire Denis par exemple et c ‘est un grand sentimental aimant écrire des lettres, des lettres d’amour, des lettres de condoléances aussi…pour lui, on n’écrit plus de lettres actuellement.
En outre, Vincent Lindon n ‘est pas avare de compliments, surtout pour les autres acteurs comme Gérard Depardieu ou Alain Delon, des acteurs hors-normes à la langue (trop?) bien pendue, de vrais artistes. Fuck Delon et Depardieu pour moi! Des comédiens qui n ‘ont plus rien à dire et à jouer…des millionnaires en fin de vie, cons et réacs qui s’extasient sur leurs films passés, surtout Alain Delon!
Mais ce qui fait, entre autre, l ‘intérêt de cet entretien, ce sont les choix artistiques radicaux de Vincent Lindon ; comme il dit « la loi du marché » (2015) invendable sur le papier ; « Welcome »(2009) pareillement (Film qui aurait pourtant rassemblé 1300000 personnes/France).
Pour lui et pour moi aussi, son film le plus emblématique « en guerre »(2018) sera toujours d’actualité d’ici 10, 20 ou 30 ans, tellement ce film est criant de vérité, très juste dans ses dénonciations sociales et politiques.
D’ailleurs, son prochain projet avec Stéphane Brizé serait un mélange de « la loi du marché » et de « en guerre » mais chez les puissants ; ceux qui décident dans un claquement de doigts de licencier 1000 personnes le jour et se retrouvent au restaurant le soir. Montrer comment ces gens-là fonctionnent et vivent.
Dans la série, je vais devenir LE spécialiste national de la filmographie de Virginie Efira, oh Yes IT’S ME!! Intéressons-nous donc à sa filmographie dans une perspective sociologique néo-féministe et personnages genrés.
Neo-féminisme que l ‘on peut analyser comme un rapport d’égalité réaffirmé hommes/femmes et non plus des rapports de domination réaffirmés. Avec cette idée que les femmes doivent être reconnues à leur juste valeur dans un vrai souci d’équité et d’égalité ; concept qui dépasse le féminisme traditionnel de lutte de droits (Apparu dans les années 1960-1970) et s’inscrit plus dans des problématiques féministes contemporaines (En dépassant par exemple les concepts d’exploitation, de discrimination ou de violence faites aux femmes, toujours d’actualité cependant au XXIè siècle).
Filmographie conséquente depuis 10 ans et elle-même le reconnaît, il y a une progressivité dans la complexité de ces personnages. Dénomination et caractéristiques des personnages comme icône, mère de famille, femmes d’autorité, avocate, femme sexuée et sexuelle…personnages genrés mais comment?
Divers statuts féminins poussés à leur paroxysme, jusque parfois vers des dérèglements sociaux ou personnels (comme dans le génial « Victoria »(2016) de Justin Triet) ; dérèglements qui modifient ou même transcendent l ‘histoire et les protagonistes du film (c’est particulièrement vrai pour « un amour impossible », où le statut de mère de famille, de famille unie sont battues en brèche tout au long du film pour aller paradoxalement vers une sorte d’absolu familial vers la fin, la mère et la fille ensemble qui se retrouvent…).
Ainsi, depuis 10 ans, Virginie Efira développe des genres féminins bien codés, mais arrivent à les transcender soit par le prisme de la comédie, du drame, de la « dramédie »…codes féminins comme l’amour maternel indépassable (dans « continuer », « un amour impossible » ou « une famille à louer »…), le corps sexué et sexuel (comme dans « Sibyl » ou « Victoria »…), les relations aliénantes vie professionnelle/vie familiale ou l’ iconisation, la sanctification d’un visage, d’une comédienne (comme dans « Caprice »(2015) de Emmanuel Mouret).
Ainsi, soit Virginie Efira joue des rôles de personnages ou d’icônes inatteignables pour les hommes (Sorte de Graal vertigineux), soit elle est moteur de l ‘action dans la fiction et la comédie (Comme dans « 20 ans d’écart », « Victoria » ou « Continuer »). En tous les cas, elle embarque les hommes dans ses épiques aventures, ses « dramédies ».
En outre, Virginie Efira n ‘échappe pas aux personnages et cinéma genrés ; genre sexuel qui peut se définir ainsi selon le sociologue Daniel Welzer-Lang:
« Le genre est défini comme le système socio-politique qui construit, organise et hiérarchise la pseudo naturalité des catégories sociales de sexe (le sexe dit biologique) en légitimant la domination masculine hétéronormative. En ce sens les rapports sociaux de sexe analysent la domination masculine et ses évolutions, les positions sociales respectives des hommes et des femmes. Les rapports sociaux de genre s’intéressent à l’hétéronormalisation des positions des personnes définies comme hommes ou femmes, la domination des sexualités définies comme minoritaires ».
Personnes genrés dans la filmographie de Virginie Efira, comme icône inatteignable:
« Caprice »(2015), « la chance de ma vie »(2011)
La femme active déréglée:
« Victoria »(2016), « Sibyl »(2019), « la chance de ma vie »(2011), « Un homme à la hauteur »(2016)
La mère de famille (très) contrariée:
« Un amour impossible »(2018), « Adieu les cons »(2020), « Continuer »(2018), Pris de court (2017)
La femme d’autorité (mais avec des fêlures intérieures):
« Police »(2020), « 20 ans d’écart »(2013), « Victoria »(2016)
Mais là où la filmographie de Virginie Efira transcende les « male gaz »(C’est-à-dire le regard masculin au cinéma sur les personnages féminins) ou les codes de la comédie romantique, ce sont par des films comme « Victoria » où tous les codes de la comédie sont portés leur incandescence ; dans ce film, elle ne s’en sort pas professionnellement, ni dans sa vie privée ; ses actes privés sont conditionnés par ses manques professionnels (rencontres foireuses de mecs sur Internet, divorce douloureux, baby-sitter démissionnaire…). Et ce qui fait le génie, entre autre, de ce film, c ‘est qu’il intègre tout ces moments de malaise, de dérèglement dans la narration, la mise en scène de l histoire, voire dans un schéma psychanalytique.
Même phénomène dans « Police » d’Anne Fontaine où elle incarne une policière, Virginie, qui remet en cause sa mission, les ordres de ramener un migrant vers son pays d’origine, c ‘est-à-dire vers une mort certaine. Cas de conscience et remise en cause personnelle qui feront contagion aussi vers ses collègues masculins.
On retrouve ainsi, dans bon nombre de comédies ou drames joués par Virginie Efira, les mêmes schémas narratifs:
) Ordre naturel, autorité remise en cause (Début du film). Ici le mariage dans « Victoria »(2016)
2) Crise personnelle et professionnelle.
3) Catharsis (Purgation des passions, moments de tension dans le film, violence verbale ou physique). Les plaidoiries dans « Victoria »(2016)
4) Puis retour vers une autre forme de normalité, de vie intérieure et professionnelle apaisée (La fin du film)
En outre, on peut constater que les personnages joués par Virginie Efira sont entraînants, moteurs dans l ‘action que ce soit vis-à-vis des protagonistes masculins (cf « la chance de ma vie », « un homme à la hauteur », « Adieu les cons » ou le génial « Victoria ») ou même féminins (« Sybil » ou « Caprice »). Moteur comme dans « continuer », où Sibylle décide d’emmener son fils délinquant dans un voyage initiatique à cheval au KIRGHIZISTAN ou dans « 20 ANS d’écart », où Alice Lantins décide de retrouver coûte que coûte son Balthazar sur son terrain universitaire à proprement parler.
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