Bon comme vous le savez, je suis avec ferveur la carrière artistique de Virginie Efira et l’une de ses comédies-phare reste « 20 ans d’écart »(2013) de David Moreau. Retour donc sur une comédie romantique à la mécanique de précision très affinée. On retrouve ainsi au scénario David Moreau, Amro Hamzawi et Virginie Efira à l’adaptation.
Comédie romantique comme les autres dans la filmographie de Mrs Efira? Que nenni mon kiki! Un film bien plus complexe qu’il en a l’air, joli succès au box-office lors de sa sortie en 2013, plus de 1 million 300 000 spectateurs sur toute la France. Un film populaire mais de qualité et dont le rythme reste très prenant, ça va à 100 à l’heure et c’est revendiqué, avec aussi des mouvements de caméra à la steadicam bien reconnaissables (le début du film notamment).
https://www.youtube.com/watch?v=Sqrou_v8FFc
Un film polysémique qui peut s’analyser sur plusieurs niveaux de lecture et qui renvoie aux schémas prédéfinis du couple hétéronormé dans notre société. Avec cette histoire d’une rédactrice de mode (Alice Lantins (Virginie Efira), rédactrice à « Rebelle », magazine de mode) cherchant à combler sa « branchitude » avec un jeune garçon de 19 ans (Balthazar joué par Pierre Niney).
Ce film fait référence à des idées préconçues sur le couple et son fonctionnement, sur la différence d’âge…et comment les autres reçoivent cette évolution des moeurs (membres de la famille, collègues de travail…). Film très intéressant dans son schéma scénaristique, une mécanique de précision qu’il faut savoir décomposer avec minutie (et qui c’est qui s’y colle, IT’S ME!! Oh Yes!).
Pierre Niney et Virginie Efira au 7ème ciel:
Tout d’abord, c’est dans l’extraordinaire que les 2 tourtereaux vont se rencontrer, à savoir un avion long courrier entre Rio de Janeiro et Paris. Moments de tension au sein de la ceinture intertropicale, symbolisés par des mains qui se frôlent et se touchent du fait de turbulences climatiques (D’ailleurs, Balthazar, à la fin du voyage, déclarera à Alice Lantins: « Ravi d’avoir frôlé la mort en votre compagnie »).
Cependant, ce qui caractérisent ces personnages c’est qu’ils sont décalés par rapport à eux-mêmes ; prenons Alice Lantins, personnage trop rigide et trop coincé dans un monde de la mode qui, lui, ne l’est pas du tout et recherche à tout prix la « hype » et « la branchitude ».
C’est ainsi un film sur la syntaxe, la sémantique et comment on l’utilise suivant les lieux où l’on se trouve, surtout dans le monde parisien. Les 2 tourtereaux vont ainsi se rencontrer sur leur lieu de travail respectif (Ecole d’architecture, Université pour lui ; défilé et shooting de mode pour elle).
Partant de ces postulats-là, leur rencontre est source de tensions comiques ou de gênes, c’est selon. Tout d’abord dans la maison de Balthazar, où Alice Lantins fait la connaissance du père de Balthazar qui, comme par hasard, sort avec une jeune fille du même âge que son fils (ancienne copine lycéenne de Balthazar ; mais ça, ça passe au niveau des moeurs…).
Même phénomène avec son ex (le génial Louis-Do de Lencquesaing) qui, lui aussi, sort avec une jeune fille plus jeune que lui. Et ce qui fait, entre autre, l’intérêt de ce film ce sont ces petits rappels incessants entre cette idée de norme et les nouvelles règles de vie que s’arrogent ces nouveaux couples, surtout les mâles dominants (on accepte plus les différences d’âge entre le mec plus vieux et la jeune fille que l’inverse ; exemple dans le film où Alice Lantins va chercher sa fille au collège après qu’elle se soit battue avec une de ses copines, copine qui a dénigré sa mère via une photo TWITTER).
Une MILF revendiquée:
https://www.lexpress.fr/culture/cinema/video-20-ans-d-ecart-un-making-of-exclusif_1226660.html
Mais ce qui fait la profonde originalité et l’anticonformisme de ce film, c’est que cette histoire banale participe de l’émancipation sociale et professionnelle d’Alice Lantins. En effet, tout ce cinéma avec la volonté de sortir ou non avec un jeune homme participe d’un rôle social et professionnel (mieux se faire voir de son boss et lui piquer son poste à terme…), mais, comme de bien entendu, cela ne va pas se passer comme prévu et Alice Lantins perdra son poste de rédactrice MAIS aura trouvé l’amour définitif et sa nouvelle vocation (écrivaine).
Scène finale où on les retrouve sur le même scooter partant vers l’horizon lointain. Comme quoi tout n’est pas perdu (et heureusement ; hé ho faut faire des entrées les amis…). L’ambition professionnelle est remplacée par l’ambition artistique.
Un milieu superficiel?
Ainsi, les surprises parsèment bien ce film, à savoir que chacun est en porte-à-faux vis-à-vis de l’univers de l’autre et ses normes ou codes. Ainsi, lorsqu’Alice Lantins se rend dans l’appartement de Balthazar, elle y est très gênée aussi bien par les pitreries du père que par la maladresse du fils. Elle est aussi très gênée, voire gauche lorsqu’elle décide de retrouver son fameux Balthazar au sein du campus universitaire vers une des dernières scènes du film (on la prend, à tort, pour une intervenante en architecture et urbanisme et elle ne maîtrise pas la syntaxe architecturale).
Lorsque les 2 tourtereaux décident de pénétrer dans l’univers de chacun, s’ensuivent des quiproquos ou gaffes qui relèvent les côtés comiques du film comme le défilé de mode très « fashion » où Balthazar essaie d’aider un mannequin à se relever (le tout en anglais), où il ose critiquer Pierre le maître des lieux (HPG très chauve) lors d’une soirée vernissage, ou autre scène, il provoque un clash entre la photographe tyrannique (la géniale Blanche Gardin) et lui comme modèle. Ces scènes de quiproquos participent de l’incompréhension générale, voire moments de tension ou dispute entre les 2 tourtereaux, mais aussi gênes ou incompréhensions d’avec le cercle familial ou professionnel.
Charles Berling et Pierre Niney:
Il existe ainsi une solidarité masculine prononcée entre le père de Balthazar et son fils pour toutes ses conquêtes féminines ; même phénomène avec la soeur d’Alice Lantins qui cherche à tout prix à la caser (que ce soit avec son gynécologue ou un ancien ami de classe d’Alice Lantins). Bref, pas facile d’assumer une relation de couple basée sur des différences aussi prononcées comme l’âge ou les moeurs ou mode de vie, cela gêne tout le monde dans ses certitudes et codes moraux.
D’ailleurs, Alice Lantins cherche à provoquer la rupture sentimentale une première fois en invoquant leurs façons de vivre différentes dans un lieu politique aussi symbolique et chargé que le siège du Parti Communiste place du colonel Fabien (le gars s’en remettra difficilement d’ailleurs). Mais bon, l’amour-passion est plus fort que tout.
https://www.youtube.com/watch?v=A54Vi8sw__w
https://www.youtube.com/watch?v=L5dAQBKJa7A
Bientôt la suite: